Michael Merrill: Studio

A l’heure de mon atelier 

 

Un garage 45 pi. x 25 pi. x 10 pi.; dans le coin une Ford Thunderbird 1964 en réparation, des murs de briques, un plancher de ciment qui penche vers le drain; le plafond isolé est plâtré mais l’eau infiltrée sous le toit a fait tomber le plâtre.  Sur une table, des papiers d’emballage de chocolat, une canette de Coke vide, un levier rouge, des outils, des chiffons sales.

Je vois mon atelier, la première fois.

Pendant six mois j’ai isolé, plâtré, posé des puits de lumière et une vraie porte.

Mon travail pouvait commencer, c’était il y a quinze ans.

Robert Smithson cite Cézanne sur la nécessité de quitter l’atelier à la rencontre du monde pour créer son propre travail, unique, à même le sol. « Il nous faut renouer avec une certaine physicalité » disait-il , « la vraie place où fuir le décoratif inhérent à l’atelier ».

En 2012 j’ai visité Spiral Jetty, Sun Tunnels, Double Negative, The Lightning Field et Marfa au Texas; sur place j’ai voulu peindre chacun de ces lieux. Impossible.

Pendant quatre ans j’ai questionné ces œuvres.  Perdre son cadre est une expérience profonde: je vois maintenant sans lunettes.

Intégré à mon environnement, je m’intéresse surtout au travail “selon la vie” avec ses percées de réalité: marées, vent, pluie, soleil, froid, etc.

L’expérience pour se transmettre, exige une forme directe d’efficacité et d’économie qui remplace le beau par le cru.  Le travail s’en trouve d’autant incarné, chaque trait une étape vers l’air libre, le sous-entendu aussi important que la surface.

Je ne vois plus mon environnement autrement: le studio me sert de sujet, comme au départ une pratique de peinture en plein air.  A mon insu la proposition de Robert Smithson s’est  inversée.  Mon atelier fait partie du monde.

Pour les artistes l’atelier est un sujet permanent: Matisse, Braque, Bruce Nauman, Paul McCarthy, Louise Bourgeois, Philip Guston, Courbet, Brancusi et d’autres.  C’est l’incubateur, la matrice, le « lieu de création ».   L’exposition prolonge la ligne entre l’atelier et la galerie.     

                                                                  Michael Merrill